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Boldo Mélok Un Rêve de Chien


Paul-Albert Rudelle


Boldo Mélok

Un Rêve de Chien


Théâtre


Hors la Loire – 2022-5





Boldo Mélok Un Rêve de Chien - 68 pages - Prix : 10 €

PAR-FAL-HlL 2022-5

Couverture : : Boldo Mélok © P.-A. Rudelle


Mise en scène de Boldo Mélok


Stéphane Godefroy a mis en scène en février 2014 une version de Boldo Mélok. Un rêve de chien. avec

Hervé Brizé dans le rôle de Boldo

&

Yohan Brizé dans le rôle de Mélok


Articles de Presse sur Boldo Mélok Un rêve de chien





Avant propos


Boldo Mélok - Un rêve de chien est une pièce sans définition. Elles? jettent les dés, les hommes sur les chemins à peine ébauchés, traversant des paysages imprécis à la poursuite des mille... Boldo et Mélok sont de ceux-là. Ils marchent sans laisser de trace, deux clowns sur une piste sans étoile, avant que la mort ou la vie ne les immobilisent ou les séparent, ils s’entrechoquent, s’éloignent, se rapprochent, se repoussent. Si Mélok parait venir d’une planète proche, Boldo, lui, s’est échappé d’un rêve de chien. De point-camp en rendez-vous, ils se la racontent et ne se comprennent pas. Chacun se fabrique un monde avec ce qu’il porte dans son sac et ce que le cheminement propose. Ici le résultat compte peu, les trajectoires sont incertaines et relatives et la destination reste inconnue. Pourtant, avec le temps, sans que les propos en soient vraiment la cause – nombre de scènes, comme les cartes d’un jeu, sont distribuées au hasard - la méfiance se dissout dans la reconnaissance. Alors, si la rencontre est vraie, c’est-à-dire si un peu de la vérité de chacun surgit – il est probable, sans certitude aucune, que l’altérité provoque d’infimes modifications du monde qu’aucune parole ne saurait capter.





Boldo Mélok

Un rêve de chien


Scène 1


La trace


Deux hommes avancent l’un derrière l’autre en trainant de gros sacs de toile remplis d’on ne sait quoi.


Mélok : (S’arrête brusquement) Stop !

Boldo : Hey ! Qu’est-ce qui te prend ?

Mélok : (Sans répondre, retourne sur ses pas et semble chercher au sol un objet perdu. Il maugrée.)

Boldo : Ça va pas ?

Mélok : Ce n’est pas possible. Pas possible…

Boldo : Qu’est-ce qu’il y a ?

Mélok : Rien. Il n’y a rien. Rien ! Rien !

Boldo : T’énerve pas. Qu’est-ce que t’as perdu ? On va le retrouver.

Mélok : (Lève le regard vers Boldo et le regarde comme s’il disait une énormité.)

Boldo : Ça doit pas être loin. Tu veux qu’on y retourne ?

Mélok : (Se met une main devant un œil et le fixe toujours)

Boldo : Si tu me disais ce que c’est au lieu de me regarder avec ton œil de bœuf, je pourrais peut-être t’aider.

Mélok : (Regarde à nouveau au sol en retournant de là où ils viennent) Je n’ai rien perdu.

Boldo : Mais alors…

Mélok : Tu ne vois pas ?

Boldo : (Regarde au sol) Non, je vois rien. De la terre. Même pas de cailloux par ici.

Mélok : C’est ça. Rien, il n’y a rien.

Boldo : Et alors, t’aurais voulu voir quoi ? T’as soif c’est ça ? T’aurais voulu qu’Elles? laissent une bouteille sur le bord du chemin ? Ou mieux : un petit casse-croute.

Mélok : Ferme-la tu veux. (Il est maintenant à genoux et examine le sol en détail.)

Boldo : Je comprends rien moi. Et puis arrête de tourner tu me donnes le tournis.

Mélok : (Il se relève et vient près de son sac.) Rien. Pas la moindre petite trace.

Boldo : Où est le problème ?

Mélok : On ne laisse pas de trace. Toi, moi, on ne laisse pas de trace. On avance, on avance et rien. Le sol ne retient rien de notre passage.

Boldo : Et c’est grave ?

Mélok : On passe et sitôt passé, pfout ! Tout s’efface comme si rien ne s’était passé.

Boldo : Ben comme ça personne nous suit.

Mélok : Un homme qui ne laisse pas de trace est un …. , n’est pas…

Boldo : Qu’est-ce tu racontes ?

Mélok : Si on ne laisse pas de trace, on n’existe pas, on passe et rien ne reste.

Boldo : Moi j’existe. Pas besoin de trace. Tu fais des nœuds avec ta langue c’est tout. Tu es bien là devant moi. Tu parles donc tu es.

Mélok : Aujourd’hui oui, mais demain. Demain comment on saura qu’on a existé, qu’on est passé par là… Les autres diront en lisant nos traces : tiens ils étaient deux, ils sont passés par là, ils trainaient quelque chose. Ils se poseront des questions sur nous et on existera encore même si on n’existe plus.

Boldo : Tu les connais ?

Mélok : Qui ?

Boldo : Les autres, ceux qui vont venir après ?

Mélok : Non. Bien sûr que non. Enfin je ne sais pas, qui sait ?

Boldo : Tu les connais ou tu les connais pas.

Mélok : Non je ne les connais pas.

Boldo : Ben alors, qu’est ce t’en as à faire ?

Mélok : Boldo, tu fais semblant ou t’es bouché ?

Boldo : D’accord, d’accord, tu les connais pas. Mais t’es sûr qu’ils viendront ?

Mélok : Je ne sais pas.

Boldo : Et même s’il y a des autres qui passent dans le coin, qui te dit qu’ils liront les traces. Ils passeront dessus sans même les remarquer, trace ou pas trace c’est pareil, on continue...

Mélok : Elle attendra. Une trace ça peut attendre.

Boldo : Elle s’effacera.

Mélok : Peut-être. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas sûr qu’il ne faut pas tenter. Ou alors on s’arrête tout de suite.

Boldo : (Il passe derrière son sac et avec la pointe de sa chaussure cherche à creuser le sol) Bon ben, on va t’en laisser des traces.

Mélok : Qu’est-ce que tu fais ?

Boldo : Je laisse une trace… (Il a beau s’échiner : rien.) T’as raison ça marche pas ici, le sol est trop dur. Allez, on repart, on essaiera plus loin.

Mélok : Ça n’a pas de sens. Ça ou rien c’est pareil…

Boldo : Bon on repart ?

Mélok : On est de la poussière. Même pas de la poussière, du vide, c’est ça, deux petits grains de vide.

Boldo : Deux « groooos » grains de vide. Allez, on se dépêche avant qu’une poule passe et nous avale.

Mélok : (Passe devant Boldo en tirant son sac.)

Boldo : Où tu vas ?

Mélok : Ben ! Au « point camp » ? C’est pas par là ? (« point camp » prononcé en anglais)

Boldo : (Hésite un instant.) Si, si. Mais, c’est moi devant. Elles? te l’ont pas dit ? (Il prend son sac et repasse devant.)

Mélok : Oh si ! Elles?me l’ont dit. Elles? m’ont dit aussi …

Boldo : Elles?t’ont dit quoi encore ?

Mélok : Elles? ? Rien…

Boldo : Allez, en accélérant un peu on rattrape le retard.




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