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Des Anihaumes - Zoothèque mon Amour


Couverture : Galaxie Végétale © P.-A. Rudelle



Des Anihaumes

Bestiaire d'où est tirée la Conférence comique

Zoothèque mon Amour


Éditions Hors la Loire 2023 Prix : 10 €


Des Anihaumes

« Les animaux ne sont pas bêtes. » répète à qui veut l’entendre le professeur Blitz. Si le nardoc n’a plus de secret pour lui, le tracusac coloré, au même titre que l’istérac, a su garder une partie son mystère.

Des Anihaumes est une conférence promenade en même temps qu’un bestiaire dressé par l’école suisse de zoologie fantastique, dirigée jusqu’à la semaine dernière par le Professeur Von Vroum. Il est composé d’animaux singuliers et plus ou moins attachants mais qui ont tous quelque chose à nous surprendre.


Quelques animaux répertoriés


Le carapate

Le carapate porte bien son nom. Il porte aussi sa belle-mère et sa petite sœur. Mais moins bien.


Nous allons pénétrer dans le territoire du nardoc. Je vous demande une attention extrême, une concentration continue sur mes propos car toute distraction peut vous être fatale. Vous connaissez le nardoc ? Non ? Comment vous le décrire ? C’est un oiseau d’aspect inoffensif. Peut-être peut-on se laisser impressionner par son gros bec, car il a vraiment un gros bec. Un peu comme le bétinier des Abruzzes vous voyez mais en… comment dire en plus disproportionné. Son bec est aussi long que le reste de son corps et si lourd, que quand il dort il lui arrive fréquemment de tomber de l’arbre où il est perché et de se retrouver fiché en terre. Une fois planté, le nardoc a un mal fou à se remettre sur pattes sans l’aide d’un de ses congénères ou plutôt d’une de ses congénères. En fait, comme dans nombre d’espèces, ce sont surtout les mâles qui tombent et les femelles qui les relèvent. Il faut dire que les femelles ont un bec un peu moins développé et un plus gros c… popotin qui leur sert de balancier. Vous me direz, mais vaudrait mieux lui dire à lui, qu’il n’a qu’à dormir au sol pour s’éviter les chutes et vous auriez raison. Mais de raison le nardoc n’en a pas beaucoup. En revanche de l’orgueil, ah ça oui. Il vous répondrait : « Un oiseau, un vrai, dormir au sol ? Non mais vous rigolez ou quoi ? Je ne suis pas un perdreau de l’année ! » Parce que les perdrix… Enfin bref, tout ça pour dire qu’à part la taille de son bec, le nardoc semble inoffensif. Si bien que quand il vient se poser sur votre épaule, quand vous passez sous son arbre, après un premier moment de surprise, vous le laissez vous accompagner avec un léger sentiment de fierté. Vous vous dites que le nardoc a su reconnaitre en vous l’amoureux sincère de la nature, que vous avez « l’épaule perchée » - une expression d’ornithologues pour dire que ça passe bien entre l’oiseau et vous, comme on dit des bons jardiniers qu’ils ont « la main verte ». Détrompez-vous ! Le nardoc est malin. Il choisit ses victimes non pour leur « épaule perchée », mais pour la naïveté, l’ignorance et la capacité empathique qu’il devine dans leur regard. Et s’il s’est perché sur votre épaule, il vous faudra attendre le moment propice pour le congédier. Trop tôt, il vous éborgnerait, trop tard vous seriez nardoqués. Vous allez comprendre ! Le nardoc, une fois perché sur votre épaule place son énorme bec sous votre nez et vous raconte sa vie. Ne riez-pas, le nardoc est extrêmement susceptible. Je vous assure. Il vous raconte tout depuis sa sortie de l’œuf, ses premières chutes de l’arbre – car il nait avec un bec déjà constitué sur un corps chauve d’oisillon – imaginez un nourrisson avec un nez d’adulte - d’ailleurs les ornithologues parlent de complexe de Cyrano chez les nardocs équivalent à notre complexe d’Œdipe mais en pire - il vous raconte par le menu les moqueries des autres oiseaux de la forêt, ses blessures d’amour propre et tout et tout. La vie d’un nardoc est rarement heureuse. Ou peut-être que seuls les malheureux racontent leur vie. On ne sait pas bien. Au début vous écoutez avec intérêt, légèrement amusé mais quand au bout d’une heure la plainte se poursuit et toujours sur le même ton, le chant du nardoc est monotone au sens propre du mot un seul ton, pleurnichard, si bien qu’à la longue – plus ou moins longue selon les gens – cela devient agaçant, très agaçant. Mais - et c’est maintenant qu’il faut bien m’écouter- il ne faut surtout pas montrer votre exacerbation, oui votre nez vous gratte, oui votre épaule est lourde, oui l’envie de faire pipi se fait de plus en plus pressante, mais résistez encore, sinon le nardoc et sa plainte vous suivront le reste de votre vie et ça je peux vous dire c’est le pire qui puisse vous arriver. D’ailleurs, vous connaissez certainement des personnes nardoquées. Non ? Mais si ! Vous savez, ces personnes qui passent leur temps à vous raconter leurs malheurs. Elles vous parlent si près sous le nez que vous avez l’impression que vous allez les aspirer. Eh bien ce sont des personnes nardoquées. Je vous assure. Et c’est incurable. Alors si un nardoc se pose sur votre épaule, voilà ce qu’il faut faire. Ne vous agacez pas et ne vous moquez pas de lui mais ponctuez ses phrases d’un « hum, hum. » compréhensif. Laissez s’écouler sa plainte comme vous regarderiez un ruisseau, le regard vague avec régulièrement un froncement de sourcil pour indiquer combien vous comprenez. Au moment où vous sentez qu’il est au bout de sa boucle, et qu’il va revenir au début pour se répéter, vous lui dites avec un air enjoué mais pas trop : « Et à part ça ?». Si vous la jouez bien, il va vous regarder de son œil rose, jeter son autre œil sur le chemin parcouru, pousser un soupir désolé tout en secouant son gros bec, comme pour dire quel corniaud vous faites et quel temps il a perdu. Ne vous impatientez pas, après quelques secondes de silence il s’envolera à la recherche d’une autre victime ou pour rejoindre son nid et partager avec sa compagne l’agacement que vous avez provoquez. D’accord ce n’est pas agréable d’être pris pour un imbécile mais cela vaut mieux, je vous assure que d’être nardoqué.


Ressembler à un gant de toilette usagé et ce dès la naissance peut donner des complexes et il faut bien le dire le barbichon écorné est bourré de complexes. Bien qu’il ne ressemble pas du tout à un gant de toilette usagé.



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